Sélectionner une page

Isabelle Seilern

Le monde est un reflet du monde
Certes, Isabelle Seilern a l’œil pictural, et subtil, fin, délicat. Mais c’est entre autres. Certes aussi elle a l’œil musical, puisque, quels que soient ses sujets – lumière dans l’eau ou sur carreaux, flaques tremblées au rythme de nos pas, spectateurs qui choisissent leur place au spectacle, ou ailleurs les avirons des régates, etc. – elle capte et restitue le tempo de ce qui se passe, de ce qui passe et nous saisit par là-même. Et comment cela nous saisit-il ? Par la musique des reflets, par les ondes qui émanent de tous et de toutes choses.

Toutes choses, et certes encore une fois (car je voudrais pouvoir dire ce qui pourtant saute aux yeux chez cette photographe), Isabelle Seilern a la poésie du banal apparent, montrant ce qu’il y a d’extraordinaire dans l’ordinaire pour peu qu’on ait l’œil attentif. Comment fixe-t-elle l’attention ? Par la vision tout en reflets, justement, qui produit ici le regard latéral qui éclaire, révèle ce qui est là. Vitrines, trottoirs, rues où aller, bitume délavé, verre dépoli, néons sous la pluie – autant de choses sur lequel l’objectif focalise en une prise de vue qui fait prisme, condense et liquéfie.

Ensuite, l’artiste détermine et travaille son optique de manière à ce que « le » réel ainsi vu réfracte l’œil qui la voit. L’œil au sens physique et psychique indissolublement emboîtés, et qui constitue ce qu’on nomme un « regard », une « manière de voir », le boîtier photographique filtrant ce qui se passe dans le boîtier crânien, depuis la cornée sensible jusque derrière la rétine, là où cela imprime sur le fond du cerveau.
Finalement, la vision tout en reflets d’Isabelle Seilern montre que le monde est un reflet du monde. De ce monde-ci évidemment, tant il reste à voir.

Jean-Philippe Domecq

Isabelle Seilern expose régulièrement en Europe.

Affichage de 1–9 sur 17 résultats